Mercredi était examiné un texte pour renforcer la répression contre le racisme et l’antisémitisme.

Les actes et propos racistes et antisémites doivent faire l’objet d’une condamnation. Mais augmenter la répression pénale ne dissuade par les auteurs de ces actes. La peine arrive après que l’acte ait été commis, il nous faut travailler en amont sur les causes de ces actes. Pour rappel, 1,2 million de citoyens déclarent être victimes d’actes racistes ou antisémites par an. Nous assistons depuis des années à une hausse continue des actes racistes et antisémites. Comme le dit le Défenseur des droits dans un rapport de 2020 « il y a urgence d’agir ».

Le groupe LFI-NUPES a donc pris comme une bonne nouvelle le fait que les députés Renaissance souhaitent proposer un loi sur cette question. Nous avons toutefois vite déchanté une fois le texte déposé. Comme à l’accoutumé, le prisme choisi est seulement de la simple répression.

Ce choix traduit une vision du racisme et de l’antisémitisme comme une somme d’actes individuels, qu’il faudrait réprimer, plutôt qu’un problème d’ensemble qui se pose à la société. Pourtant le racisme et l’antisémitisme sont systémiques dans le sens où ils s’expriment partout : les personnes considérées comme « non blanches » sont ainsi davantage exposées au chômage, à la précarité sociale, à de mauvaises conditions de logement, à un état de santé plus dégradé, etc.

Extrait du compte-rendu des débats en hémicycle : M. Mathieu Lefèvre, rapporteur Renaissance : Je ne partage pas du tout l’analyse qui prête un caractère systémique au racisme, car j’ai foi en l’individu, et je pense que les systèmes n’existent pas. (« Mais non ! » et exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Mme Danièle Obono, députée La France insoumise - NUPES : Évidemment que le racisme est systémique !

Les députés Renaissance refusent de reconnaître la dimension systémique du racisme.

Dès lors la solution ne peut être purement pénale. D’autant plus qu’il existe de vrais obstacles pour les victimes : seules 5% d’entres elles portent plainte. Renvoyer la lutte contre le racisme à une aggravation des peines, c’est donc faire l’impasse sur 95% des actes. Ajoutons à cela que le caractère dissuasif de la sévérité des peines n’a jamais été démontré. Avant de vouloir sans cesse augmenter les peines, peut-être faudrait-il se demander si les peines sont appliquées et si elles permettent d’empêcher les récidives.

Car oui, sur un plan purement pénal l’enjeu n’est pas le durcissement des peines mais le travail en amont pour faciliter les dépôts de plaines et en aval sur l’effectivité de la législation actuelle. Trop de procédures peinent à aboutir, durcir les peines n’y changera rien. C’est d’ailleurs ce qui a été dit par la quasi intégralité des experts, juges et avocats auditionnés lors de l’examen du texte. En touchant au droit de la presse, ce texte fragilise un équilibre ancien et subtil pour un résultat quasi nul.

Tout au long de débats, les députés LFI, dont mes collègues Antoine Léaument et Danièle Obono, ont demandé un véritable accompagnement des victimes, un plan ambitieux de lutte contre le racisme et l’antisémitisme pour l’ensemble des politiques publiques. Des mesures portées depuis des années par La France insoumise dans son livret thématique Pour une République antiraciste. Les députés Renaissance et du Rassemblement national ont préféré transformer l’hémicycle en farce et en débat des élections européennes : un mépris immense pour les victimes du racisme et de l’antisémitisme.

Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice, mime une quenelle, symbole antisémite, au sein de l'hémicycle.

Éric Dupond-Moretti mime une quenelle, symbole antisémite, au sein de l’hémicycle

Devant un refus de traiter le problème dans son ensemble et la réduction du racisme et de l’antisémitisme à une question pénale, les députés LFI-NUPES ont choisi de s’abstenir sur ce texte. Les victimes méritaient mieux que des effets d’annonce.